Les jardins ouvriers familiaux de Saint-Etienne
- « J’ai transmis à ma fille l’envie de faire un jardin, et elle a fait un jardin comme le mien… »
- « Du fait que beaucoup de parcelles disparaissent, nous avons des listes d’attente donc pas de jardin de disponible »
- « C’est agréable de pouvoir avoir des fleurs qu’on peut amener chez soi »
C'est quoi ?
Aujourd'hui appelés jardins familiaux, les jardins ouvriers sont nés au XIXe siècle afin d’améliorer le sort des ouvriers souffrant à cette époque des conjonctures économiques très difficiles. Ces petits jardins cultivés permettaient de ramener les gens à la terre et leur offraient la possibilité d’avoir un complément alimentaire non négligeable.
©Archives municipales de Saint-Etienne, Jardins ouvriers de Solaure (5FI 9816)
À Saint-Étienne, c’est au Père Volpette qu’on doit la création de ces jardins. À la fin du XIXe, la concurrence étrangère pousse les industries stéphanoises à fermer ou à renvoyer de nombreux ouvriers et beaucoup de familles se retrouvent alors dans la misère. Déjà en 1884, le Père Crozier, supérieur du collège des Jésuites de Saint-Étienne, écrivait : « … nous avons travaillé beaucoup et dépensé de grandes forces à Saint-Étienne…Qu’avons-nous fait pour les ouvriers ? Rien…Il est temps de s’y consacrer ! ». Des bureaux de consultations ou des cours du soir pour les apprentis sont créés, mais c’est en 1891, grâce à la publication de l’encyclique du pape Léon XIII, « Rerum novarum » (Des choses nouvelles) que les conditions de travail sont dénoncées et qu’une conscience s’éveille.
C’est alors que le Père Félix Volpette prend connaissance d’une action conduite par Félicité Hervieu. Épouse de drapier de Sedan, elle donne en location à des familles dans le besoin une parcelle de terrain à cultiver. Cette entreprise séduit le Père Volpette : « Avec les jardins, pas d’humiliation, pas d’aumône. C’est de l’assistance que vous faites et la meilleure de toutes : par le travail de la terre vous ramenez l’homme à son origine première, vous lui changez ses occupations habituelles, vous lui permettez de souffler et de réfléchir ». C’est ainsi que dès 1895, il réussit à louer, acheter ou se faire prêter des terres et que les jardins prennent un essor considérable.
L’expression « jardins ouvriers » est née dans le Nord où ces jardins furent instaurés par l’Abbé Lemire dès 1896 après une rencontre avec le Père Volpette. En 1922, à la mort du Père Volpette, le nombre de jardins ouvriers stéphanois s’élève à 1500.
En 1919, les sociétés autonomes de jardins ouvriers qui avaient vu le jour se regroupent au sein de la "Fédération des sociétés des jardins ouvriers de l'arrondissement de Saint-Étienne".
Aujourd’hui, l’association du Père Volpette et la Fédération des jardins ouvriers et familiaux continuent leur œuvre et la passion des jardiniers offre plus que jamais à la ville un air de campagne.
Ça se passe où ?
Saint-Étienne est un chef-lieu du département de la Loire.
©Ooh collective, Saint-Etienne
Un brin d’évasion
Les jardins ouvriers de Mulhouse
Les premiers jardins ouvriers voient le jour à Mulhouse dans les années 1830-1840. Au départ, les terres situées aux alentours des usines sont louées par le patron à moindre coût à ses ouvriers afin qu’ils puissent cultiver leur potager et s’assurer des moyens de subsistance en cas de chômage ou de crise.
Petit à petit, le rôle du patronat est repris par la municipalité, les associations et les coopératives, qui mettent à disposition de nouvelles terres appelées « jardins familiaux ».
Les « pocket gardens »
Originaire des États-Unis, une nouvelle génération de jardins commence à apparaître en France. Appelés « pocket gardens » ce qui signifie jardin de poche, ce ne sont plus des parcelles individuelles, mais un jardin collectif. Les parcelles, souvent assez petites et situées au coin d’une rue sont des jardins de partage. Les gens se réunissent en association. En plus du travail commun de la culture des fruits et des légumes, les habitants partagent l’échange et la convivialité. Certaines terres sont attribuées à des écoles où les élèves encadrés par les enseignants sont responsables de leur entretien.
Un brin d'histoire
Histoire de Saint-Étienne
Saint-Étienne grandit à l’ombre de l’abbaye cistercienne de Valbenoîte fondée en 1184. Grâce aux eaux du Furan, la ville se lance dans la fabrication d’armes blanches puis des armes à feu, organisée par un ingénieur de François 1er. En même temps se développent le tissage des rubans et la production de multiples objets en métal (boucles de chaussures, fers à osties, charnières, serrures, moulins à café, etc …). Petit à petit, les manufactures se développent et exportent dans toute l’Europe.À la fin du XVIIIe siècle, l’armurerie est la principale activité de la ville, au point où Saint-Étienne est appelée Armeville.
Mais c’est au XIXe que le visage de la ville change et qu’elle prend un réel essor grâce à l’extraction du charbon et au développement de la métallurgie devenant une ville pionnière dans le paysage industriel français. Autour de 1890, Saint-Étienne comptait 146000 habitants dont 95420 ouvriers employés dans la passementerie, les mines et la métallurgie. Mais la concurrence étrangère aussi bien dans la production de rubans, d’armes ou dans l’exploitation des mines plongea de nombreuses familles dans la misère.
Fort de cette exceptionnelle aventure industrielle, la ville est aujourd’hui classée Ville d’Art et d’Histoire.
©Ooh collective, Saint-Etienne
Un brin de poésie
Hymne à la gloire des jardins ouvriers (vers 1930)
1
Dans les jardins ouvriers
La peine du jardinier
Sera bien récompensée
Son sol sera bien bêché
La terre ainsi fécondée
Produira boire et manger
2
À la fin de la journée
Le bonheur de l’ouvrier
Est d’aller se reposer
Dans son jardin cultivé
Bon air et tranquillité
Font la joie et la santé
De toute la maisonnée
3
Car chacun dans son carré
Plantera des groseilliers
Choux poireaux et chicorée
Pommes de terre bette et fraisiers
Immortelles, pois de senteur
Pour qu’un chacun ait du bonheur
4
passementiers, armuriers
mineurs, employés, gaziers
Du marais aux Marronniers
De la Rich’land au clapier
Font bon ménage au jardin
En buvant le jus divin
5
Toujours gais et souriants
Dans la peine se consolant Quand vient la gêne, s’aidant.
Ils s’aiment fraternellement,
Suivant les enseignements
Du Fondateur, coeur aimant.
6
Gloire aux jardins ouvriers
Lopins de terre tant aimés
De tout le monde ouvrier
Procurant Joie, liberté,
Gaîté et Fraternité
À tous nos bons ouvriers
Petit abécédaire
ABBÉ LEMIRE : 1853-1928. Maire d’Hazebrouck et fondateur des jardins ouvriers du Nord en 1896
©Archives municipales d’Hazebrouck (Fonds Lemire-Arbelet)
Abbé Lemire
LIGUE D’UN COIN DE TERRE ET DU FOYER : ligue fondée par le Dr Lancry à Dunkerque et l’abbé Lemire en 1896.
OUVRIER : provient du latin operarius qui signifie « ouvrier, homme de peine », qui dérive de opera, oeuvre.
PÈRE CROZIER : supérieur du collège des Jésuites de Saint-Étienne
PÈRE FÉLIX VOLPETTE : 1856-1922. Fondateur des jardins ouvriers de Saint-Étienne.
SAINTE BARBE : patronne des mineurs.
STAINS : commune de la Seine-Saint-Denis où la tradition du jardin ouvrier est très développée. On dénombre effectivement 800 jardins ouvriers pour 33000 habitants.
Sources
Site de l’office de tourisme de Saint-Etienne et sa région. -Saint-Etienne. -[réf. du 29 août 2011], [en ligne], disponible sur internet : http://www.tourisme-st-etienne.com/index.php/site/Totem-Pratique/Decouvrez-notre-territoire/Les-43-communes/Saint-Etienne/Presentation
Site sur l’Abbé Lemire, [réf du 29 août 2011], [en ligne], disponible sur internet : http://membres.multimania.fr/abbelemire/index.html
Ministère de la Culture et de la Communication / Musée des civilisations Europe Méditerranée. -Album Moulin : l’œuvre des jardins ouvriers de Saint-Etienne (1907). -[réf. du 29 août 2011], [document en ligne], disponible sur internet : http://www.culture.gouv.fr/documentation/phocem/Albums/Moulin-presentation.pdf
Histoire et Patrimoine de Saint-Etienne. -Les premiers jardins ouvriers à Saint-Etienne ... par le Père Volpette. -[réf. du 29 août 2011], [en ligne], disponible sur internet : http://vieux.saint.etienne.perso.sfr.fr/jardinsouvriers.htm
Au jardin info. -Des jardins familiaux aux jardins partagés. -[réf. du 29 août 2011], [en ligne], disponible sur internet : : http://www.aujardin.info/fiches/jardins-familiaux-partages.php
LACHKAREFF, Pierre / MAUBEC, Hélène. -Stains, au bonheur des jardins. -Editions La dispute, 2000, 128 p.
[Ouvrage collectif]. -Jardins d'Alsace, quatre siècles d'histoire de l'art. -Editions Lieux Dits, 2010, 224 p.
EFTIMAKIS, Robert. -Hazebrouck et sa région au temps de L'abbé Lemire (1853-1928). -Editions R. Eftimakis, 2006, 262 p.
Liens utiles
Site de la ville de Saint-Étienne : http://www.saint-etienne.fr/Site Forez info : http://www.forez-info.com/
Site Histoire et Patrimoine de Saint-Etienne : http://www.histoireetpatrimoinedesaintetienne.com
Site des archives municipales de Saint-Etienne : http://archives.saint-etienne.fr
Site de l’association Mémoire de l’abbé Lemire : http://memoire-abbe-lemire.monsite-orange.fr/
Site du photographe Yves Bresson : http://www.yves-bresson.org/
Site de la Fédération des associations de musiques & danses traditionnelles : http://www.famdt.com/
Site de l’association Les Brayauds : http://brayauds.free.fr
Site myspace du groupe Komred : http://www.myspace.com/komredtradÀ écouter
Komred (interp.), Morceau traditionnel du Poitou, Promptement levez-vous les voisins, Musiques d’Auvergne, FAMDT, Les Brayauds, 2009