Patrimoine culturel immatériel

La tradition vinaigrière à OrléansLa tradition vinaigrière à Orléans

  • « On est plus à l’époque du Moyen Âge où les bateaux remontaient le long de la Loire. »
  • « Le plus beau souvenir c’est ce vinaigre qu’on a élevé dans nos barriques durant 9 ans d’âge »
  • « Magnifier ! »

C'est quoi ?

Le vinaigre, probablement né d’un accident de fermentation, était déjà utilisé 5000 ans avant J.-C. en guise d’aliment ou de médicament. Hippocrate (Ve siècle av. J.-C.) prescrivait des ordonnances avec du vinaigre, Jules César le buvait dilué dans de l’eau pour se désaltérer et les Grecs ainsi que les Romains l’utilisaient pour conserver des aliments. C’est également du vinaigre qui fut proposé au Christ comme dernière boisson sur la croix :

« Après quoi, sachant que désormais tout était achevé pour que l'Écriture fût parfaitement accomplie, Jésus dit : « J'ai soif ».
Un vase était là, rempli de vinaigre. On mit autour d'une branche d'hysope une éponge imbibée de vinaigre et on l'approcha de sa bouche. » (Jean 19:28, 29)

Le vin mal conservé se transformait rapidement en vinaigre, qui coupé d’eau était fréquemment utilisé comme boisson rafraîchissante.

©Ooh collective, Tonneaux de vinaigre
©Ooh collective

Le vinaigre d’Orléans pour sa part, nait d’une combinaison de température, d’air, de temps et d’un grand principe : l’utilisation de bons vins donne du bon vinaigre.

« Dans la méthode Orléanaise, la transformation se fait par une fermentation naturelle de surface sans aucun brassage du liquide, ni ajout de ferments ou autres accélérateurs d’oxydation.  Le vinaigre est conservé à l’abri de la lumière dans des « vaisseaux » en fûts de chêne d’une capacité de 240 litres pendant 3 semaines à une température constante de 30°C.

Ensuite, le vinaigre vieillit pendant au  moins 1 an dans des « foudres » de chêne, fûts de 200 à 5000 litres en cave, à la température de 15°C. Le bon vinaigre comme le bon vin se bonifie en vieillissant ! » (1)

Certains vinaigres rares peuvent atteindre 9 ans d’âge !

« Au Moyen Âge, la Loire était navigable et Orléans un grand port fluvial. L’origine de cette production locale s’explique par l’utilisation des vins qui s’étaient piqués lors de leur transport sur les bateaux. Les vins piqués étaient alors transformés en vinaigre par les artisans locaux [...].

Au XVIe siècle, les Vinaigriers d’Orléans obtiennent la reconnaissance de leur métier par les lettres patentes royales fixant les conditions de fabrication afin de lutter contre les mauvaises contrefaçons des vinaigres qui nuisent à leur métier.

La fabrication du vinaigre, industrie orléanaise par excellence, se développe depuis le Moyen Âge et trouve sa reconnaissance dès le XIXe siècle. Juste avant la Révolution, il y avait entre 200 et 300 vinaigriers.
Deux siècles plus tard, résistant à l’industrialisation à outrance, seule la maison Martin Pouret perpétue l’élaboration du vinaigre d’Orléans à la même adresse selon cette méthode artisanale et traditionnelle » (2)

(1) Martin Pouret. -La méthode Orléanaise. -[réf. du 24 août 2011], [en ligne], disponible sur internet : http ://www.martin-pouret.com/La%20Methode%20Orleanaise.htm

(2) Martin Pouret. -Histoire. -[réf. du 24 août 2011], [en ligne], disponible sur internet : http://www.martin-pouret.com/histoire%20de%20la%20maison.htm

Ça se passe où ?

Orléans est un chef-lieu de la région Centre et du département du Loiret.

©Ooh collective, Orléans
©Ooh collective

Un brin d’évasion

L’Élixir Végétal de la Grande-Chartreuse, « Élixir de longue vie »

« En 1605, le maréchal d'Estrées remet aux moines de la Chartreuse de Vauvert, à Paris, un manuscrit révélant la formule d'un "élixir" (contenant la quasi-totalité des plantes médicinales de l'époque), dont nul ne sait l'origine.
À cette époque, en effet, seuls les moines et les apothicaires possèdent les connaissances nécessaires au travail des plantes. [...]
Trop complexe, la recette de cet élixir - surnommé "Élixir de longue vie" - semble n'avoir été que partiellement utilisée pendant plusieurs décennies à Paris.
En 1737, le Monastère de la Grande-Chartreuse (proche de la ville de Grenoble) décide d'en faire une étude exhaustive. L'apothicaire de la Grande-Chartreuse, Frère Jérôme Maubec, est chargé de cette tâche. Il parvient à fixer définitivement la formule de ce qui devient l'Élixir Végétal de la Grande-Chartreuse. [...] Il titre 69°. »

« Seuls les Pères Chartreux connaissent les noms des 130 plantes utilisées pour faire la liqueur Chartreuse; 2 chartreux, Dom Benoit et Frère Jean-Jacques, sont en charge de la fabrication. »

La Chartreuse. -[réf. du 24 août 2011], [en ligne], disponible sur internet : http://www.chartreuse.fr/histoire-des-liqueurs;article;40;fr.html / http://www.chartreuse.fr/la-fabrication-aujourd-hui;article;66;fr.html

Un brin d'histoire

Histoire d’Orléans

« La possibilité de franchir le fleuve conduit l’homme à s’installer dès la plus haute antiquité en ces lieux où se situe actuellement Orléans. La ville se développe en lien étroit avec la Loire, d’abord sur la rive droite, le long du Fleuve, puis au nord vers Paris.

De Cenabum, comptoir gaulois en territoire carnute, au port florissant du XVIIIe siècle ouvert sur les Antilles et l’industrie du sucre, Orléans est une ville d’échanges commerciaux et de convergence des cultures. Ainsi, prestigieux centre intellectuel sous le règne de Charlemagne, ses écoles deviennent universités au Moyen Âge. Son statut de ville royale l’a placé au coeur de toutes les convulsions de l’histoire du royaume de France dont le fait d’armes le plus illustre demeure sa délivrance par Jeanne d’Arc en 1429.

Aux XVe et XVIe siècles, la ville est l’une des plus belles de France. Églises et hôtels particuliers s’y multiplient. Les guerres de religion troublent fortement cette prospérité, que la ville ne retrouvera qu’au XVIIe siècle.

Au XIXe, l’arrivée du chemin de fer bouleverse l’économie de la ville. La Seconde guerre mondiale frappe Orléans de plein fouet. Les destructions sont nombreuses. Après la guerre, Orléans s’engage dans une vaste opération de reconstruction et se développe au sud de la Loire avec la création du quartier de La Source.

Aujourd’hui capitale régionale, Orléans associe dynamisme économique, qualité de la vie et rayonnement culturel. »

Ville d’Orléans. -Orléans, ville d’art et d’histoire. -[réf. du 24 août 2011], [en ligne], disponible sur internet : http://www.orleans.fr/orleans/hier/ville-dart-et-dhistoire.html

©N.T., Statue de Jeanne d’Arc – Place du Martoi
©N.T., Statue de Jeanne d’Arc – Place du Martoi

Un brin de poésie

La Loire

Chanson de J. Durand-Desjeux , S. Kerval.
Paroles issues de l’album En Orléans sur Loire.

La Loire est morte ce matin
Entre St Nazaire et Mindin
C'est un marin du bout du monde
Qui l'a poussé dans l'océan
Sans savoir pourquoi ni comment
La triste fin pour une blonde
Elle était née, du moins dit-on,
Au pied du Mont Gerbier-des-Joncs
Et son enfance fut farouche.
Elle a couru dans les cailloux
Entre les moutons et les loups,
La fleur de gentiane à la bouche.

Puis elle a grandi sans façon,
Mais dans les bois, les scieurs de long
Savaient déjà qu'elle était belle.
Et chacun d'eux rêvait la nuit
D'aller la promener au Puy
Pour lui offrir de la dentelle
Mais elle aimait mieux les rubans,
Les bleus, les rouges et les blancs,
Comme ceux que porte Marianne.
Et pour s'en pavoiser le cœur
Elle a suivi un colporteur,
Jusqu'aux fabriques de Roanne.

Mais c'est plus loin, près de Nevers,
Qu'elle a vu la feuille à l'envers
Avec ses yeux bleu-defaïence.
Et c'est un bouvier Bourbonnais
Qui était son frère de lait
Qui a cueilli sa défaillance !
Ainsi le sort en fut jeté
En passant par la Charité,
Bon Dieu pourtant qu'elle était maigre !
Elle a séduit un gros marchand
Qui l'emmena en Orléans
Respirer la fleur de vinaigre.

Sur le chemin de ses amours,
Orléans ne fut qu'un détour
Car le bourgeois se la fit prendre
Par le roi qui venait à Blois
Le roi qu'on appelait François
François Premier la Salamandre !
Mais les amours s'ils son princiers,
Se déchirent dans les ronciers
En allant cueillir la framboise,
Et c'est avec les jardiniers,
Les vignerons, les tonneliers
Qu'elle a gouté au vin d'Amboise.

Puisqu'à Tours on est puritain
Qu'on n'aime pas que les catins
Viennent jeter leurs sortilèges,
À Saumur elle est allée voir
Des cavaliers vêtus de noir
Qui font tourner un grand manège.
Elle a tourné jusqu'en Anjou
Avec encore du rose aux joues,
La rose blanche à son corsage.
Mais elle a su à St Florent,
Quand elle a vu passer le temps,
Qu'un jour on la mettrait en cage !

À Nantes où sont les derniers ponts
Elle a voulu danser en rond
Ainsi que voulait sa nature.
Mais les hommes de ce pays
N'aimaient qu'une fille aux yeux gris
Qui leur promettait l'aventure.
Et pour la mettre à la raison
On a mis la Loire en prison
On l'a chargée de lourdes chaînes,
Ce furent ses derniers colliers.
Les négriers vont par milliers,
S'il n'y a plus de bois d'ébène

Et quand sa peine fut purgée,
Elle a suivi un étranger
Pourquoi, pourquoi quand on y songe
Pour gagner cette maladie
Qui brûle encor' à ce qu'on dit,
Aux quatre coins du port de Donges
La Loire est morte ce matin
Entre St Nazaire et Mindin
C'est un marin du bout du monde
Qui l'a poussé dans l'océan
Sans savoir pourquoi ni comment
La triste fin pour une blonde

©N.T., Vue sur la Loire
©N.T., Vue sur la Loire

Petit abécédaire

ACÉTOBACTER : bactérie qui constitue la mère du vinaigre . Elle transforme l’alcool en acide acétique.

©Ooh collective, Acétobacter
©Ooh collective, Acétobacter

CÉPAGES : la qualité du vin utilisé pour le vinaigre est une priorité à Orléans. Les cépages utilisés sont le cabernet franc, le cabernet sauvignon, le chardonnay, le pinot noir, le gamay, le merlot ou le muscadet.

DESSAUX FILS : vinaigrerie fondée en 1824. Elle ne cesse de s’agrandir et devient, 50 ans plus tard, la première vinaigrerie du monde. Elle disparaît du paysage orléanais en se faisant racheter en 1965.

FOUDRES : fûts de chêne d’une contenance de 200 à 5000 litres dans lesquels le vinaigre vieillit pendant au moins un an.

MARTIN POURET : Estampillée Maître Vinaigrier depuis 1797, la Maison Martin Pouret est la dernière à défendre la tradition du vinaigre à l’ancienne, selon le procédé d’Orléans.

MÈRE DU VINAIGRE : pellicule qui se forme à la surface du vin en cours de la transformation.

MONTURES : nom donné aux grands fûts horizontaux.

VAISSEAUX : fûts de chêne d’une capacité de 240 litres dans lesquels le vinaigre est conservé à l’abri de la lumière pendant 3 semaines à une température constante de 30°C.

VINAIGRE : le nom de vinaigre vient de « vin aigre ».

Sources

Site de la Chartreuse : http://www.chartreuse.fr/histoire-des-liqueurs;article;40;fr.html

Ville de Fleury-les-Aubrais. -De Floriacum à Fleury-les-Aubrais. -Maury imprimeur, 2000, pages 80-83

Liens utiles

Site de la ville d’Orléans : http://www.orleans.fr

Site de Martin Pouret : http://www.martin-pouret.com/

Site du Festival de Loire : http://www.orleans.fr/festival-de-loire-2011

Site de La Bouline : http://www.labouline.com/

À écouter

Jacques Durand-Desjeux (paroles), Serge Kerval (musique), La Bouline (interp. et arrangements), La Loire, En Orléans sur Loire