Patrimoine culturel immatériel

La bourrée auvergnateLa bourrée auvergnate

  • Ç’a été le coup de foudre quand j’ai vu des gens qui avaient une telle liberté
  • La bourrée c’est une quête.

C'est quoi ?

Les origines. Le terme de bourrée est utilisé pour la première fois à la Cour en 1605 dans le journal du médecin du jeune Louis XIII. Les premiers documents qui l’évoquent, la présente comme une danse à deux temps. Cependant il faut attendre le XVIIIe siècle pour avoir des informations chorégraphiques. Dès lors, on trouve des traces du pas bourré, le plus utilisé de tous les pas. Le pas d’appui des bourrées de cour est aussi celui des bourrées populaires.

Cependant, l’origine parisienne de la bourrée reste incertaine. Une théorie du XVIIe siècle la situerait en Auvergne, alors qu’une autre mentionne une origine biscayenne.

Toujours est-il qu’originaire ou non d’Auvergne, Fléchier, dans ses Mémoires sur les Grands Jours d’Auvergne mentionne en 1665 la « bourrée d’Auvergne », prouvant ainsi l’existence et la pratique de cette danse dans la région.

Clermont Ferrand
©Ooh collective, Clermont Ferrand

Les influences. La population vivant en Auvergne est une population extrêmement mobile, à l’intérieur du territoire, mais aussi vers l’étranger. Les nombreux travaux des champs ont nécessité une main d’œuvre de travailleurs saisonniers venant de régions voisines. Le brassage social permet une grande circulation des versions de chansons et de danses à l’intérieur du Massif Central.

« Jusqu’à la première moitié du XIXe siècle, les migrants saisonniers partis de Haute-Auvergne se dirigent, à l’intérieur même de la France, vers des provinces diverses, plus particulièrement la Gascogne, le Languedoc et le Roussillon. Mais un contingent important se répand d’autre part en Espagne, et ce dès la Renaissance au moins, notamment aux XVIe et XVIIe siècle, quand le « Siècle d’Or » est en quête de main d’œuvre étrangère. Cette migration va perdurer au moins jusqu’au XVIIIe siècle, voire au-delà. » Il est donc fort probable que la bourrée est été influencée par le contact avec l’Espagne. Aux abords du XXe siècle, cette migration se raréfie, et c’est Paris qui attire les auvergnats, bien que ce mouvement de population ait démarré dès le XVIIIe siècle.

Au départ, le bal-musette est un café-bal tenu par un compatriote ou se retrouvent les ressortissants du Centre. Une fois par semaine, les gens se rencontrent et dansent au son de la musette, qui est une cornemuse. Ces bals-musettes vont permettre de préserver et unifier les danses traditionnelles, mais aussi de découvrir de nouveaux répertoires parisiens de l’époque (les danses pour couple fermé, le quadrille, le cotillon de fin de bal avec figures et trajets valsés) qui vont être intégrés dans la bourrée. Cette danse inchangée jusqu’au milieu du XIXe siècle est renouvelée et adoptée dans les différentes régions du Massif Central.

Stage de bourrée à Riom
©Ooh collective, Stage de bourrée à Riom

On distingue deux sortes de bourrées :

  • La bourrée à deux temps : principale danse de Basse-Auvergne jusqu’au milieu du XIXe siècle, cette bourrée est encore pratiquée en Bourbonnais, Limousin, Nivernais, Charolais et en Bas-Berry.
  • La bourrée à trois temps aussi appelées « montagnarde » ou « auvergnate » se retrouve en Haute-Auvergne, Limousin, Rouergue, Gévaudan, Morvan et Haut-Berry.

Le pas de la bourrée à trois temps est composé de trois appuis, quelque soit son rythme et son déplacement.

Les instruments qui accompagnaient traditionnellement la bourrée sont l’accordéon, la cabrette, la vielle à roue ou le violon. Cependant, les musiques traditionnelles ont depuis toujours été des musiques de leur temps qui ont répondu aux besoins du moment : on peut faire danser à la voix, avec un harmonica, au saxophone, au fifre, à la clarinette ainsi qu’à la guitare électrique

Ça se passe où ?

L’Auvergne est une région administrative du centre de la France, comprenant les départements de l’Allier, du Cantal, de la Haute-Loire et du Puy-de-Dôme.

Riom, chef-lieu d’arrondissement du Puy-de-Dôme, était l’ancienne capitale du duché d’Auvergne.

Un brin d’évasion

Le branle.

Bien que l’étymologie soit incertaine, on pense que le mot évoque des trajets en va et vient (branler : osciller, aller d’un côté puis de l’autre).

Le branle désigne à la fois un des pas composés de la basse danse (XVe et XVIe siècle) et une danse en chaîne où hommes et femmes se tenant par la main dansent côte à côte.

« Dans les milieux dirigeants […] Quels qu’aient été, des derniers Valois à Louis XIV, les renouvellements de la danse, une suite réglée de branles a continué, jusque peu avant la fin du XVIIesiècle, d’ouvrir les bals de Cour, et par voie de conséquence, ceux des milieux qui prennent modèle sur elle. Bien des réunions se terminent d’autre part sur un " branle de sortie " regroupant une dernière fois l’ensemble de la compagnie après la longue succession de courantes ou de menuets qui ont mis en vedette des couples successifs. En dehors des bals, les branles chantés […] tiennent une place importante dans la récréation des courtisans. Ils continueront d’être appréciés sous la Régence, en dépit d’un contenu moteur qui va s’appauvrissant. A cette date, les branles proprement dits disparaîtront peu à peu du bal — du fait que c’est désormais le menuet qui l’ouvre le plus souvent, et que la récréation communautaire y est assurée par les contredanses — et l’appellation de ronde commence de prévaloir pour désigner un répertoire chanté promis à une longue vogue, au prix de nombreux renouvellements.

Le branle du rat
Les Morvandiaux d’Autun, Le branle du rat

Dans les milieux traditionnels. Nous ne savons à peu près rien des branles qu’ont pu danser les paysans du XVeau XIXe siècle. À l’époque de l’enquête ethnographique, c’est-à-dire au XXesiècle, on retrouve dans les campagnes françaises des danses appelées branles d’une part, et d’autre part des danses d’appellations diverses, que leur nature invite à considérer comme étroitement apparentées au répertoire des anciens branles.
L’appellation branle concerne d’abord des danses traditionnelles en chaîne ouverte ou fermée […], lors même que ces danses ont parfois substitué à date récente le dispositif en couple à l’ancienne chaîne. Il est arrivé aussi que l’on conservât le nom de branle à des danses dont le visage s’était renouvelé par incorporation d’éléments empruntés à d’autres répertoires, notamment la contredanse et plus particulièrement le cotillon parisien de fin de bal […], voire par métissage avec la bourrée […].

Mais surtout, on retrouve la logique des branles — danses en chaîne aux trajets en va-et-vient portés par des doubles, des simples et des pieds levés — dans diverses danses localement désignées comme ronds ou rondes […]. Avant de voir dans ces formes traditionnelles la pure et simple conservation des branles tels qu’ils nous sont connus par les sources écrites, il faut se rappeler que les milieux traditionnels eux aussi ont une histoire qui leur est propre et dont nous ne savons pas grand chose. De sorte que toute étude comparative se doit d’être critique et ne débouche sur aucune certitude. »

Un brin d'histoire

L’Auvergne

“L'Auvergne est une des plus anciennes unités régionales de France, mais aussi une de celles dont les frontières ont le moins varié. Étendue sur les montagnes du Massif Central, elle est le territoire du peuple celte des Arvernes, qui s'impose en Gaule par son hégémonie culturelle, technique et économique, puis en prenant à deux époques la tête de la résistance militaire à la conquête romaine.

Vue sur des volcans d’Auvergne
©Ooh collective, Vue sur des volcans d’Auvergne

Prospère à l'époque gallo-romaine, christianisée par Saint-Austremoine et ses disciples, elle devient ensuite un des derniers bastions de la romanité face aux Wisigoths.

L'Auvergne traverse des âges sombres au début du Moyen Age, avant de connaître un nouvel essor, à partir du Xe siècle, marqué par un grand élan spirituel, intellectuel et artistique, sous l'impulsion de ses évêques et de ses abbayes, dans une relative indépendance qui durera jusqu'au XIIIe siècle. Arbitrairement annexée et intégrée au domaine royal, et subissant progressivement la centralisation du royaume de France puis de la République, elle perd lentement son autonomie pour se voir reléguée au rang de province agricole, isolée par son relief, son mode de vie traditionnel, et un particularisme solidement ancré.”

Riom

« […] Le nom celtique de Ricomagnum – le riche marché – indique un centre économique aux fonctions commerciales importantes au carrefour de deux grandes voies, la route de la vallée de l’Allier et celle de l’océan Atlantique.

Au Moyen Age, Riom, bourg d’origine antique, se développe autour d’un édifice religieux devenu lieu de pèlerinage sur les reliques de saint Amable. Capitale administrative des Terres royales d’Auvergne dès le XIIIe siècle, la ville connaît alors deux périodes fastes : celles des apanages d’Alphonse de Poitiers (1241–1271) et de Jean de Berry (1361–1416). L’un lui donne un nouveau plan d’urbanisme, l’autre construit le palais ducal et la Sainte-Chapelle.

Riom
©Ooh collective, Riom

A la Renaissance, après l’apanage de la famille de Bourbon (1416–1527), la ville, comme le duché d’Auvergne, revient à Louise de Savoie, mère de François 1er, puis définitivement à la couronne de France en 1531. Riom est une ville florissante, siège des différentes juridictions royales. […]

Au XVIIIe siècle, la ville s’ouvre sur l’extérieur avec la démolition des remparts et l’aménagement de boulevards plantés d’arbres. Parallèlement aux grands travaux d’urbanisme, les particuliers construisent de nouveaux hôtels ou entreprennent des rénovations en remplaçant les façades à pignons du XVIIe siècle par des façades rectangulaires.

Après la Révolution, Riom conserve une fonction judiciaire et obtient la création de la cour d’appel en 1804, année où Riom devient sous-préfecture. Débute alors ce qu’on appellera « le chantier du siècle » : la construction du Palais de Justice à l’emplacement du Palais des Ducs (1824-1846). Le XIXe siècle voit l’extension de la ville mais il n’a que bien peu transformé le centre ancien.

Unanimement reconnu aujourd’hui, le caractère esthétique du patrimoine architectural fait l’attrait de ce secteur sauvegardé (1967) […]. »

Un brin de poésie

Chanson pour l’Auvergnat
Georges Brassens, 1954.

Elle est à toi cette chanson
Toi l'Auvergnat qui sans façon
M'as donné quatre bouts de bois
Quand dans ma vie il faisait froid
Toi qui m'as donné du feu quand
Les croquantes et les croquants
Tous les gens bien intentionnés
M'avaient fermé la porte au nez
Ce n'était rien qu'un feu de bois
Mais il m'avait chauffé le corps
Et dans mon âme il brûle encore
A la manière d'un feu de joie

Toi l'Auvergnat quand tu mourras
Quand le croqu'mort t'emportera
Qu'il te conduise à travers ciel
Au père éternel

Elle est à toi cette chanson
Toi l'hôtesse qui sans façon
M'as donné quatre bouts de pain
Quand dans ma vie il faisait faim
Toi qui m'ouvris ta huche quand
Les croquantes et les croquants
Tous les gens bien intentionnés
S'amusaient à me voir jeûner
Ce n'était rien qu'un peu de pain
Mais il m'avait chauffé le corps
Et dans mon âme il brûle encore
A la manière d'un grand festin

Toi l'hôtesse quand tu mourras
Quand le croqu'mort t'emportera
Qu'il te conduise à travers ciel
Au père éternel

Elle est à toi cette chanson
Toi l'étranger qui sans façon
D'un air malheureux m'as souri
Lorsque les gendarmes m'ont pris
Toi qui n'as pas applaudi quand
Les croquantes et les croquants
Tous les gens bien intentionnés
Riaient de me voir emmener
Ce n'était rien qu'un peu de miel
Mais il m'avait chauffé le corps
Et dans mon âme il brûle encore
A la manière d'un grand soleil

Toi l'étranger quand tu mourras
Quand le croqu'mort t'emportera
Qu'il te conduise à travers ciel
Au père éternel

Petit abécédaire

Accordéon : « Il apparaît en Europe aux alentours de 1830 et subit par la suite de nombreuses transformations. Au XIXe siècle il est surtout utilisé en principe diatonique bissonore (un son tiré différent du son poussé). Ce n'est qu'à la fin du XIXe siècle qu'il apparaît sous la forme accordéon chromatique qu'on lui connaît actuellement (même son suivant le sens du coup de soufflet). […] L'accordéon diatonique d'un prix abordable, pénètre le milieu rural à l'époque de la première guerre mondiale et […] s'adapte très vite à la musique de danse.[…]. »

Bacchu ber : danse d’épée en Savoie.

Société des Admirateurs du Bacchu-ber
©Société des Admirateurs du Bacchu-ber

Bal-musette : Les bals-musettes vont permettre de préserver et unifier les danses traditionnelles, mais aussi de découvrir de nouveaux répertoires parisiens de l’époque (les danses pour couple fermé, le quadrille, le cotillon de fin de bal avec figures et trajets valsés) qui vont être intégrés dans la bourrée.

Bourrée à 3 temps : bourrée « montagnarde » ou encore « auvergnate ».

Branle du rat (le) : Cette danse, typique du Morvan était exécutée pour faire fuir les rats afin de préserver les récoltes ou selon une autre version pour chasser les rats des planchers dans la maison de jeunes mariés. Le branle se danse en deux lignes, hommes et femmes se faisant face sont disposés en carré, la première figure exécutée est le pas de polka. Puis suivent des déplacements en diagonale et des croisements. Les hommes soulevant obligatoirement leur chapeau à chaque traversée.

Cabrette : « La cabrette, une des cornemuses du Massif Central à son histoire étroitement mêlée au phénomène de la colonie auvergnate de Paris. Sous sa forme actuelle elle remonte à la première moitié du XIXe siècle et se présente en trois parties :

  • le sac : outre en peau de chèvre recouverte d'un tissu généralement de velours qui retient l'air et permet un jeu continu de l'instrument.
  • le pied : il comprend: Le hautbois qui sert à réaliser la mélodie et dont les particularismes sont dus à la forme de la perce intérieure ainsi qu'au type d'anche double utilisé. Le tuyau d'accompagnement appelé bourdon […] Le boîtier relie ces deux éléments au sac permettant l'interchangeabilité des pieds (donc des tonalités).
  • Le soufflet : il n'est pas à attribué uniquement à la cabrette et encore moins à l'invention d'un auvergnat car nombre de cornemuses l'utilisent depuis longtemps en Europe. […] »

Vielle à roue : « Cet instrument fut très utilisé dans le centre de la France grâce à l'importante fabrication des facteurs de vielles de Jenzat (Allier). […].Instruments à cordes mélodiques et rythmiques, la vielle est à rapprocher du violon pour son principe sonore. L'archet est remplacé par la roue qui frotte les cordes, et le manche par un clavier.

Des cordes supplémentaires servent à l'accompagnement (bourdons) et à la rythmique (corde du chien). Le chien étant un chevalet mobile vibrant sur la table lors du coup de poignet.

La vielle était essentiellement pratiquée au Nord des Monts d'Auvergne, en Combrailles[…] »

Instrument la vielle
©Ooh collective, Instrument la vielle

Violon : « […] Contrairement à ce qui est souvent pensé, le Violon est l'instrument populaire le plus répandu sur les Monts d'Auvergne. La musique de violon s'est en partie maintenue grâce sa fonction dans la veillée et la fête familiale. […] La pratique du violon populaire diffère de celle du violon classique. Les variétés de répertoires et de techniques d'interprétation sont nombreuses du Cézallier à l'Artense. »

Sources

GUILCHER, Yves. - La danse traditionnelle en France : d'une ancienne civilisation paysanne à un loisir revivaliste. - FAMDT Ed., 2001, 276 p.

Site Internet de la ville de Riom. - Histoire et Patrimoine. - [réf. du 4 sept. 2010], [en ligne], Disponible sur Internet : http://www.ville-riom.fr/Histoire-Patrimoine

GUILCHER, Yves. - Le branle. - Maison des Cultures de Pays, [réf. du 4 sept. 2010], [document en ligne], Disponible sur Internet : http://195.101.116.236/phonomediaupload/Mettxt046.html

Dictionnaires et encyclopédies sur Academic, [réf. du 4 sept. 2010], [en ligne], Disponible sur Internet : http://fr.academic.ru/

Site de Planète Auvergne, [réf. du 4 sept. 2010], [en ligne], Disponible sur Internet : http://www.planete-auvergne.com/

Liens utiles

Site de diatojo : http://www.diatojo.com/tablatures/

Site des Musiques et Territoires d’Auvergne : http://www.amta.fr

Site de la Fédération des Associations de Musiques & Danses Traditionnelles : http://www.famdt.com/

Site de l’association Les Brayauds : http://brayauds.free.fr/

Site de Bardane : http://www.myspace.com/bardane

Site du groupe les Morvandiaux d’Autun : http://www.lesmorvandiauxdautun.fr/

A écouter

BARDANE, Montagnarde du voisinage du Puy-de-Dôme, Musiques du Puy de Dôme, Jean-Baptiste Bouillet 1828-2003 de la collecte à la création, 2004, A.M.T.A.